J’en discutais avec mon amie Nathalie Gourdin, en début d’année 2023. À cette époque des voeux et des galettes, ça licenciait partout. Je partageais avec Nathalie le sentiment que les femmes sont davantage touchées par les vagues de licenciements planétaires dans la tech. Dès lors, je me rendais régulièrement sur le site Layoffs.fyi et je constatais jour après jour l’ampleur des dégâts. Des chiffres, des pourcentages, des grands noms, des plus petits. Mais pas de données genrées. Pourtant, les services dits “très féminins” en général, et dont la tech ne faisaient pas exception : les ressources humaines, le marketing, le service client, le service communication et RP, le service “inclusion, diversité - fake it until you never make it-” semblaient très affaiblis.
Et puis il y avait LinkedIn. Dans mon flux, les hommes licenciés prenaient immédiatement la parole et se mettaient en quête d’une nouvelle aventure professionnelle. Les femmes, elles, étaient beaucoup plus silencieuses. Sur TikTok et feuTwitter, certaines s’exprimaient davantage, mais sur le ton de l’humour, de l’autodérision.
Avec Nathalie, on a décidé d'organiser des tables rondes autour du sujet. J’ai mené l’enquête un peu partout au sein de mon réseau, et mon intuition s’est confirmée. C’était quand même pas la joie du côté des femmes de la tech licenciées. Elles étaient licenciées et silenciées.
Ce n’est qu’aujourd’hui, huit mois après la tempête, que je trouve des chiffres. Sur la période d’octobre 2022 à juin 2023, les femmes représentaient 45 % des employés technologiques licenciés, selon une étude menée par Layoffs.fyi et Axios et sur 3 404 employés licenciés.
Ce chiffre est à mettre en perspective avec celui-ci : les femmes représentaient alors 39 % de la main-d'œuvre globale dans l’industrie tech.
Elles étaient moins et pourtant elles ont été licenciées massivement. Classique. Simple. Basique. En temps de crise, les femmes sont toujours les premières victimes.
À l’été 2023, la tendance est à l'accalmie. Toutefois, cela ne présage rien de bon pour davantage de recrutements féminins et techniques. Comment vont s’occuper les services “inclusion, diversité - fake it until you never make it -” ? Ah, j’oubliais, ils n’existent plus.
Pour aller plus loin, je vous conseille cet excellent podcast sur le sujet, produit par Slate avec en invitées l’éminente journaliste Emma Goldberg, spécialiste du “Future of Work” au New York Times, et des femmes, licenciées qui prennent enfin la parole.
- Par Laetitia Lamari, fondatrice de WIRE -